Texte: Fabian Kern / Illustration: Dieter Stocker / Photo: Alamy, Getty Images
«Celui qui porte un pantalon de jogging a perdu le contrôle de sa vie». C’est la star de la mode Karl Lagerfeld qui a énoncé cette phrase il y a dix ans sur une chaîne de télévision allemande. Emile Camuset, le fondateur de la marque de sport Le Coq Sportif, n’aurait sans doute pas imaginé que son invention serait un jour aussi controversée. Lorsque le Français a créé un pantalon en jersey tricoté dans les années 1920, il voulait simplement permettre aux amateurs de sport de s’entraîner confortablement et sans avoir froid, même en hiver. Dans les années 1970, ce vêtement devient très populaire. Étroit en haut, évasé en bas, en nylon, il reste cantonné au sport mais devient incontournable. Dans les années 1980, la coupe redevient plus large, de préférence en coton, et il sort des terrains de sport pour aller en discothèque. Finalement, on a aussi besoin de liberté de mouvement sur la piste de danse, non? Et ce n’est que le début d’une irrésistible ascension. Voici quatre raisons pour lesquelles le pantalon de jogging s’est imposé sans se laisser impressionner par la déclaration de Karl Lagerfeld.
L’évolution du jogging ressemble à celle du jean. Le pantalon d’ouvrier a longtemps été considéré comme trop décontracté et peu présentable. C’est pourquoi, après le travail, on laissait tomber le pantalon de costume au profit du jean. Mais les jeunes portaient le jean comme un acte de rébellion, en toute occasion. Avec le changement de génération, le jean s’est élevé au rang de vêtement polyvalent. Aujourd’hui, la génération Z a décidé que son nouveau jean, ce serait le jogging, et qu’elle souhaite porter… tout le temps. D’autant plus que les boomers désapprouvent!
Dans les années 1990, le jogging a continué à s’émanciper des terrains de sport. Grâce à qui? Grâce à la scène hip-hop. Chez les rappeurs, les sweatpants larges sont soudain devenus un signe d’appartenance. Depuis les États-Unis, la tendance a gagné l’Europe. Dans les années 2000, elle a commencé à s’immiscer dans toutes sortes de domaines de la vie quotidienne. Le 21 janvier 2009, quatre lycéens autrichiens ont lancé la journée du jogging en convainquant toute leur classe de venir à l’école en pantalon de training.
Alors que le jogging est interdit dans certaines écoles, considéré comme un vêtement inapproprié, et fait débat, le Covid a frappé! Tout à coup, on a tous eu la tentation de passer la journée en jogging, durant le confinement et l’ère du home office. Vêtement le plus porté de la pandémie, et pas seulement en Suisse, il a été également mis en avant par des célébrités de la musique comme Taylor Swift ou Harry Styles, qui se sont fait photographier avec ce type de pantalons pendant le confinement. Résultat: leur popularité a encore grimpé.
Tous les designers ne partagent pas le point de vue radical de Karl Lagerfeld, décédé en 2019 (voir le texte principal). Des stylistes vedettes comme Michael Michalsky et Alexander Wang sont même des fans déclarés du jogging, et des marques de luxe comme Gucci ou Chanel proposent également leurs interprétations de cette pièce devenue iconique.
Aujourd’hui, ces vêtements ne se limitent plus au gris ou au noir. Les variantes, matériaux et styles sont infinis. Le pantalon de jogging est définitivement entré dans les mœurs, que cela plaise ou non!
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